Soniquetes jerezanos - 1

L’ école de guitare de Jerez

mardi 9 septembre 2008 par Claude Worms

Après l’ école du Sacromonte de Grenade et l’ hommage à Diego del Gastor et à Morón (cf : nos articles dans la même rubrique), le pélerinage à Jerez s’ imposait : bref historique de la guitare flamenca jérézane, et donc, naturellement, du "toque por Bulería" local (avec, comme d’ habitude, partitions et Mp3).

La Plazuela : ermita de la Yedra

Comme le Sacromonte de Grenade et Morón de la Frontera, Jerez est depuis longtemps l’ un des lieus majeurs de l’ histoire de la guitare flamenca. L ’ école de Jerez est plus proche de celle de Morón, tant par ses formes privilégiés (Soleá, Soleá por Bulería, Siguiriyas, Tangos, et surtout Bulerías) que par son esthétique (jeu monodique - "a cuerda pelá", basé sur les techniques de pouce et le picado). Elle s’ en distingue cependant par une plus grande diversité des principaux créateurs, et par un son très "terrien" : la plupart des guitaristes privilégient la puissance sonore et un solide ancrage des falsetas sur les temps forts des compases. Surtout, l’ école de Jerez est un cas historique unique de transmission directe sur plus d’ un siècle, à la fois par les relations de maîtres à disciples, et par la persistance d’ une tradition guitaristique au sein de quelques familles.

LES ORIGINES - JAVIER MOLINA / PERICO EL DEL LUNAR

Nous avons déjà eu l’ occasion d’ évoquer le rôle déterminant de Javier Molina Cundi (Jerez, 1868 - 1956) dans la genèse du "toque por Bulería" (cf : "Les fondateurs de la guitare flamenca soliste" : Niño Ricardo ; Manolo de Huelva), et son influence sur les styles de ces deux guitaristes, dont il fut le collègue, et l’ aîné respecté, au "Café Novedades" de Séville. En ces années 1920, Javier Molina avait déjà une longue carrière derrière lui : il avait été le premier guitariste d’ Antonio Chacón, dès les années 1880, et avait accompagné Tomás el Nitri, Joaquín Lacherna, El Marruro, Frijones, Manuel Molina..., c’ est à dire quelques uns des créateurs les plus importants des Siguiriyas de Jerez. On comprend que ses falsetas "por Siguiriya" figurent encore actuellement au répertoire des guitaristes de l’ école de Jerez, et que Javier Molina ait été le guitariste favori de Manuel Torres (le seul avec lequel il ait enregistré). Rappelons enfin que Javier Molina fut aussi à l’ origine des Alegrías en Sol, qu’ il composa vraisemblablement pour accompagner la danse.

Le "toque de Jerez" tel que nous le connaissons fut donc créé essentiellement par Javier Molina, et constituait dans le premier tiers du XXème siècle la seule alternative esthétique crédible à l’ école plus virtuose des guitaristes

madrilènes (Rafael Marín, Ramón Montoya, Miguel Borrull, Luis Molina, Luis Yance...). Il exerça une influence évidente sur beaucoup de professionnels de l’ époque : outre Niño Ricardo et Manolo de Huelva, sur Francisco Pantoja Fernández "Currito el de la Jeroma" (extraordinaire musicien polyvalent - cantaor, bailaor, tocaor... et pianiste, né à Séville en 1900, et mort prématurément en 1930 de tuberculose et d’ alcoolisme. Il nous laisse quelques enregistrements avec La Niña de los Peines), Manolo de Badajoz (1894 - 1962) - et son fils Justo (1927), Pepe de Badajoz (1899 - 1970) - et son disciple Pedro Soler, Sabicas, Melchor de Marchena... En amont, et bien que Javier Molina ait toujours été très discret sur sa propre formation, nous pouvons avec vraisemblance remonter la chaîne de transmission jusqu’ à José Patiño Gonzalez "Maestro Patiño" (Cádiz, 1829 - 1902) : il fut le professeur de Francisco Sánchez Cantero "Paco el Barbero" (Cádiz, 1840 - 1910), qui fut le maître de Javier Molina, peut-être directement, en tout cas indirectement par l’ intermédiaire d’ Antonio Sol et de Rafael Barroso.

Malgré son exceptionnelle longévité, Javier Molina n’ a enregistré que quatre faces de 78 tours, en accompagnement à Manuel Torres, en 1931 (deux Soleares et deux Siguiriyas). Pour nous faire une idée de ses compositions, nous ne pouvons donc recourir qu’ aux témoignages et enregistrements de ses élèves. Ayant quitté la scène au début des années 1940, il consacra en effet la fin de sa vie à l’ enseignement. Nous savons qu’il compta parmi ses nombreux disciples Rafael Fernández García "Rafael de Jerez" (1926), Manuel Morao (1929) et son frère Juan Moreno "Moraíto chico" (1935 - 2002), et surtout Rafael del Águila y Aranda (1900 - 1976), qui forma à son tour la plupart des guitaristes de la génération suivante (cf : ci-dessous). Les enregistrements de Parrilla de Jerez, élève de Rafael del Águila, abondent en références aux compositions de Javier Molina. Nous reproduisons ci-contre ses versions de deux falsetas "por Alegría" : la première évoque immanquablement Sabicas, et la seconde Niño Ricardo, mais Parrilla les attribuent à Molina, et nous n’ avons aucune raison de douter de son témoignage.

Transcriptions : deux falsetas "por Alegría" de Javier Molina : extraites de "Recordando a Javier, par Parrilla de Jerez

Une autre approche du style de Javier Molina peut nous être apportée par l’ étude des enregistrements de Pedro del Valle "Perico el del Lunar"

(Jerez, 1894 - Madrid, 1964). Il peut paraître étrange de classer Perico el del Lunar parmi les maîtres de l’ école de Jerez, alors qu ’il est surtout célèbre pour sa carrière madrilène et française (la fameuse anthologie de 1954). Fernando de Triana, cantaor et mémorialiste, soulignait pourtant la parenté entre les styles des deux guitaristes dès 1935, dans son ouvrage "Arte y artistas flamencos". Outre le lieu de naissance et la proximité avec Chacón (si Molina fut le premier guitariste du cantaor, Perico accompagna ses derniers cantes enregistrés), les deux guitaristes ont surtout en commun le jeu "a cuerda pelá" et le goût de la concision, similitudes (pour l’ esprit sinon pour la lettre) particulièrement frappantes dans leurs falsetas "por Siguiriya" et "por Soleá" (du moins, en ce qui concerne Molina, pour celles qui lui sont attribuées). Pedro del Valle Castro "Perico Hijo" (1940) perpétue actuellement le style de son père. Perico "el Viejo" a peu enregistré "por Bulerías" : nous vous proposons deux de ses rares falsetas.

Transcriptions : deux falsetas "por Bulerías" de Perico el del Lunar : en accompagnement à Rafael Romero

LA TRANSMISSION : RAFAEL DEL ÁGUILA ET LES DYNASTIES "MORAO" et "PARRILLA"

Le principal vecteur de transmission du style de Javier Molina, et donc du "toque jerezano", est Rafael del Águila. Elève de Javier Molina, il se consacra totalement à l’ enseignement. On compte parmi ses élèves la plupart des guitaristes professionnels de Jerez nés dans les années 1940 - 1960 : Francisco López Cepero García "Paco Cepero" (1942), Manuel Fernández Molina "Parrilla de Jerez" (1945) et son frère Juan (1943), Francisco Fernández Loreto "Curro de Jerez" (1949), José María Molero Zayas (1953), Pedro Carrasco Romero "Niño Jero" (1953) et son frère Antonio (1957), Antonio Higuero Pazos (1969)... et Gerardo Nuñez (1961).

José Luis Balao Pintero (1938) et surtout Manuel Lozano Gómez "El Carbonero" (1949), autres élèves de Rafael del Águila, sont devenus à leur tour des professeurs respectés.

Parallèlement, deux dynasties ont perpétué la tradition jérézane jusqu’ à nos jours :

_ Los "Moraos" : Manuel Moreno Pantoja (1955), fils de Manuel, a commencé très jeune une carrière de guitariste professionnel qu’ il a rapidement abandonnée. Manuel Moreno Junquera (1956 - 2011)) est le fils de Juan (1935 - 2002), et donc le neveu de Manuel Morao. Il est actuellement le guitariste le plus représentatif de l’ école de Jerez (cf : seconde partie de notre article) : d’ abord connu comme "Moraíto chico hijo", il est devenu au fil du temps "Moraíto chico", et enfin "Moraíto". La génération actuelle est représentée par son fils, Diego Moreno Jiménez "Diego del Morao" (1978).

_ Los "Parrillas" : Manuel Fernández Gálvez "Parrillita" (1967) est le fils de Juan, et donc le neveu de Manuel "Parrilla de Jerez". Guitariste discret et méconnu, il n’ en est pas moins, à notre avis, le guitariste de Jerez le plus intéressant de sa génération : son style est basé sur un alliage subtil et très original de tradition et de "modernité". Ses frères Juan (1968) et Bernardo (1969), respectivement flûtiste et violoniste, ont pris une part importante à la diversification instrumentale du "nuevo flamenco".

de gauche à droite : Paco Cepero, Manuel Morao, Parrilla de Jerez

TROIS MAÎTRES : MANUEL MORAO / PACO CEPERO / PARRILLA DE JEREZ

Manuel Morao est actuellement le vétéran de l’ école de Jerez. Guitariste de premier plan depuis les années 1950, il a accompagné la plupart des

grands artistes qui marquèrent à l’ époque le renouveau du cante traditionnel : La Perla de Cádiz, Chano Lobato, Antonio Mairena, La Paquera, Terremoto, La Piriñaca... Il a été le premier guitariste de la compagnie d’ Antonio de 1953 à 1964, et le guitariste "officiel" de Philips au début du microsillon en Espagne, dans les années 1950 : à ce titre, nous lui devons une bonne part de la discographie de La Paquera et de Terremoto. Il a aussi été choisi par Antonio Mairena pour accompagner, avec Melchor de Marchena et Juan Moreno "Moraíto chico", les protagonistes de l’ "Antología del cante flamenco y cante gitano" (trois LPs Decca 258.031 - 32 - 33, 1968 - réédition en CD : RCA / BMG, série "Tablao" 74321 878922, 2001). Il a obtenu, entre autres, le prix d’ accompagnement du concours de Cordoue (1965), et le "Premio Nacional de Guitarra de la Cátedra de Jerez" (1969).

Depuis 1966, Manuel Morao n’ a cessé d’ oeuvrer pour la promotion du patrimoine musical gitan de Jerez : d’ abord par la création des "Jueves flamencos", qui révélèrent des artistes comme José Mercé, Agujetas, El Nano... ; puis en tant que producteur de spectacles avec sa compagnie "Gitanos de Jerez". Il exerce aussi des responsabilités importantes au sein de la "Cátedra de Jerez" et de la "Fundación andaluza de Flamenco".

Son style est marqué par un usage intensif et virtuose des techniques de pulgar, en particulier de l’ "alzapúa" "à l’ ancienne" (alternance P / i / P), dont la vélocité et la puissance n’ est égalée que par Parrilla de Jerez.

Transcriptions : deux falsetas "por Bulerías" de Manuel Morao : en accompagnement à La Perla de Cádiz

Petit neveu du cantaor José Cepero, Paco Cepero s’ est d’ abord fait connaître en accompagnant quelques maîtres du cante de Jerez, tels La Piriñaca, El Borrico, El Sernita, ou Terremoto. Dans les années 1960, il travaille pour le tablao madrilène "Los Canasteros", comme guitariste et directeur de "cuadro". Il y rencontre Camarón dont il devient le premier guitariste attitré, et participe avec lui et avec Paco de Lucía aux tournées européennes du spectacle "Festival flamenco gitano", produit par Horst Lippmann (dans les premiers enregistrements de Camarón et Paco de Lucía, certaines parties de seconde guitare jouées par Paco Cepero, sont attribuées par erreur à Ramón de Algeciras).

Dans les années 1970, Paco Cepero est l’ invité incontournable des festivals andalous, et vole régulièrement la vedette aux artistes qu’ il est censé accompagner. Il multiplie les enregistrements avec la plupart des jeunes valeurs du cante de l’ époque, notamment Juan Villar, El Turronero, Chiquetete, Rancapino, Pansequito, La Marelu... Il devient progressivement

producteur de ces enregistrements, et compose à l’ occasion des titres plus commerciaux : rumbas, chansons "por Tangos" ou "por Bulerías"... Ces activités de moins en moins flamencas (mais sans doute de plus en plus lucratives) le conduisent à collaborer avec quelques vedettes de la variété andalouse (Chiquete, qui a suivi son exemple, Rocío Jurado, María Jímenez) et même avec... Julio Iglesias. Il peut ainsi être considéré comme l’ un des précurseurs du "nuevo flamenco", d’ autant plus qu’ il participe à la même époque à quelques expérience de fusion : jazz, avec Pedro Itturalde et Pepe Nieto ; musique arabo-andalouse, avec El Lebrijano et l’ "Orquesta Andalusí de Tanger". Enfin, il enregistre en 1977 "La guitarra de Paco Cepero : Amuleto", son premier disque en tant que soliste (LP EMI C062-21415).

Depuis une dizaine d’ années, Paco Cepero est revenu au flamenco, ce qui nous a valu deux merveilleux enregistrements avec Rancapino (Turner Records, 1995) et Santiago Donday (Nuevos Medios, 2003), et trois disques en solo ("De pura cepa" - FODS Records, 2000 ; "Corazón y bordón" - FODS Records, 2004 ; "Abolengo" - Bujío, 2007) où il se montre égal à lui-même, c’ est à dire éblouissant dans les formes "a compás" (et surtout dans les Bulerías), mais capable de la pire mièvrerie dans ses compositions "aflamencadas" ("baladas" et autres "caprichos").

Paco Cepero est surtout un remarquable accompagnateur, immédiatement identifiable par ses réponses fulgurantes (pouce ou "picado") au cantaor. En tant que soliste, il est l’ inventeur d’ un système de développement continu des falsetas "por Bulerías", à base d’ "alzapúa" ravageuse (il est le seul guitariste de Jerez de cette génération à pratiquer l’ "alzapúa" moderne en allers-retours du pouce) et de contretemps en cascade (par groupes de deux notes : attaque sur le contretemps et liaison sur le temps, fréquemment sur des mouvements chromatiques) : son style se démarque ainsi nettement de celui des autres guitaristes de Jerez, plutôt adeptes de la concision.

Transcriptions : deux falsetas "por Bulerías" de Paco Cepero : en accompagnement à El Borrico

Parrilla de Jerez marque la troisième génération d’ une grande dynastie d’ artistes de Jerez : son grand père était Juanichi el Manijero, et son père Tío Parrilla, tous deux grands cantaores (il est aussi le neveu d’ El Borrico et d’ El Sernita). Il a commencé sa carrière professionnelle à treize ans, à la féria de Séville, et est devenu dans les années 1970 l’ un des guitaristes de référence du toque traditionnel, qu’ il défend avec cependant un style très personnel. Il

est alors pendant quelques années le partenaire d’ Enrique Morente (avec lequel il enregistre le fameux "Homenaje flamenco a Miguel Hernández" - LP Hispavox, 1971), et enregistre avec José Menese, Manuel de Paula, Curro Malena, Pansequito, La Piriñaca, Agujetas, La Paquera, El Juanata, El Borrico... Habitué des tablaos madrilènes et gaditans, il travailla aussi de longues années pour les compagnies de Lola Flores et de La Paquera, dont il fut le fidèle accompagnateur jusqu’ à sa récente disparition.

Comme Manuel Morao, Parrilla de Jerez se soucie de la conservation de la culture musicale des gitans de Jerez : il dirige les choeurs de la Cátedra de Jerez et de la peña "Tío José de Paula", avec lesquels il a produit plusieurs anthologies de Villancicos, en en reconstituant le cadre traditionnel, la "zambomba jerezana".

Des trois patriarches de l’ école de Jerez, Parrilla nous semble être le compositeur le plus intéressant : à l’ art rythmique consommé de ses collègues, il joint une finesse mélodique qui rapproche son style de celui de Niño Ricardo. Si ses Bulerías sont justement célèbres, il est aussi l’ auteur de remarquables compositions sur d’ autres formes, notamment les Soleares, le Zapateado, les Sevillanas, la Serrana, les Tangos, et surtout les Siguiriyas. Son premier enregistrement solo ("Guitarra gitana" -LP CBS 64306) n’ ayant jamais été réédité en CD, on pourra s’ en convaincre à l’ audition des récents
"Jondura" (JON, 1996) et "Guitarra flamenca : nostalgía" (VDE-Gallo, 1999).

Transcriptions : deux falsetas "por Bulerías" de Parrilla de Jerez : en accompagnement à Pansequito

Claude Worms

Discographie

Perico el del Lunar : "Rafael Romero, Juan Varea, Perico el del Lunar : grabaciones en París, 1956 - 1959" : production El Flamenco Vive

Manuel Morao : collection "Grandes guitarras del flamenco" : Philips 522 324

Paco Cepero : "Abolengo" : Bujío

Parrilla de Jerez : "Guitarra flamenca : nostalgía" : VDE-Gallo CD-985

Bibliographie

Augusto Butler : "Javier Molina, jerezano y tocaor" - C. de las Reales Academias hispano americana de Cádiz y sevillana de Buenas Letras, 1963

José Manuel Gamboa : "Perico el del Lunar, un flamenco de antología" - Arte Flamenco, Cordoue, 2001

José Manuel Gamboa : "Una historia del flamenco" - Espasa Calpe, Madrid, 2005

José Manuel Gamboa : "Guía libre del flamenco" - Fundación Autor, Madrid, 2001

Norberto Torres : "Historia de la guitarra flamenca" - Editorial Almuzara, Séville, 2005

Transcriptions

Alegrías / Javier Molina / page 1
Alegrías / Javier Molina / page 2
Alegrías / Javier Molina / page 3
Bulerías / Perico el del Lunar
Bulerías / Manuel Morao / page 1
Bulerías / Manuel Morao / page 2
Bulerías / Paco Cepero / page 1
Bulerías / Paco Cepero / page 2
Bulerías / Paco Cepero / page 3
Bulerías / Parrilla / page 1
Bulerías / Parrilla / page 2
Bulerías / Parrilla / page 3

Galerie sonore

Javier Molina : Alegrías (version Parrilla de Jerez, extraite de "Recordando a Javier")

Perico el del Lunar : Bulerías

Manuel Morao : Bulerías

Paco Cepero : Bulerías

Parrilla de Jerez : Bulerías


Alegrías / Javier Molina / falseta n° 1
Alegrías / Javier Molina / falseta n° 2
Bulerías / Perico el del Lunar
Bulerías / Manuel Morao
Bulerías / Paco Cepero
Bulerías / Parrilla de Jerez




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